#enfances #3 I gambader

Gambader. Ni marcher, trop lent, ni courir, trop simple, gambader. Gambader, presque voler. S’envoler. Jambe droite en avant, la gauche en même temps, décoller. Ivresse. Rien n’empêche d’étendre les bras, ou de poser les mains sur la taille. Gambader comme on danse.

Je vais retrouver mon amie. Elle habite au bout de la rue. Toute la rue nous sépare. Vite, la retrouver. Mais déjà l’exultation. Gambader. Comme un chant. Une célébration. J’ignore ce mot. Mais mon corps s’élance, je danse. Je vole. Pas une expression. Je vole vers toi. L’amour donne des ailes. Non. Je vole.

Les façades des maisons, les jardins défilent. Mes jambes comme montées sur ressort me projettent en l’air, j’atteins le ciel. Pourquoi rester rivée au sol? Je vole.

Elle n’est pas essoufflée, ne fait nul effort. Le corps est léger, plus rien de la rattache au sol. Tantôt la jambe droite en avant, tantôt la jambe gauche. Toute les cinq ou six enjambées, elle change de pied. En ville, sur les trottoirs, elle doit marcher. Dès qu’elle peut, elle court. Mais ce qu’elle aime par dessus tout, c’est gambader. Elle fait corps avec son corps, elle fait corps avec l’espace.

Elle a l’impression d’aller plus vite qu’en courant.

Je n’en suis pas certaine.

A propos de Betty Gomez

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