#photofictions #09 | île madame

Le petit escalier est la seule issue, tant l’ont descendu jamais remonté. La mer leur était faible horizon, l’entrevoir leur était espoir, vivre un jour ou deux encore. De la photo google lens a dit tipaza, pusillanime tour de passe-passe, usurpation de ciel, de clarté, de lumière ; souvenir quand même de cris, de rires gras mais pourquoi si loin, cet escalier qui ne va nulle part cette cheminée qui n’aère rien pourquoi, pour la mémoire seule ou pour faire jaillir l’idée que dessous sous le sable sous la mer, que l’escalier qui ne vient de nulle part qui ne va nulle part ne s’arrête pas là ne peut pas s’arrêter là descend au royaume des fantômes de ce temps pas si lointain de ceux de tipaza de blida d’arzew qui cherchaient dans la lumière époustouflante des traces de liberté noces de terre ocre, de mer bleue, de sable argent. De ce ciel presque blanc tipaza est loin, de cet escalier de parpaings de cette cheminée inutile blida est loin et pourtant google lens et ma mémoire se troublent mélangent dates, dunes brunes & ruines rouges, vagues brutales & calme gris infini, septentrionne méditerranée & bout de terre minuscule à l’ombre d’oléron. Sur la dune érodée au-delà des ronces, j’imagine un chemin qui mène au bâtiment d’où viennent les rires et seul dans un coin un homme héros déchu qui n’ose pas ne pas entendre les cris qui n’osera jamais dire qui mourra de n’avoir pas osé dire ; tu courais ici enfant attentif aux heures des marées fier d’échapper à la mer montante pour reprendre la route du transbordeur le visage inondé de pluie fasciné par le vol d’étourneaux ; une prochaine fois parmi les fantômes sous le sable, sous la mer, ceux de mostaganem de tipaza de blida tu trouveras, c’est sûr, celui que tu es venu chercher, le père que tu avais si peu connu.

mots-clés : 2022, Hiver, Infrasculptures, 9-29/01/22, Littoral, Rochefortais

A propos de bernard dudoignon

Ne pas laisser filer le temps, ne pas tout perdre, qu'il reste quelque chose. Vanité inouïe.

15 commentaires à propos de “#photofictions #09 | île madame”

  1. en insérant les mots-clés, me suis aperçu que sur cette riche page du Rocherfortais avais fait même photo qu’E&N des tracteurs de la pointe de Fouras, tout usés par rouille marine

  2. L’escalier qui ne mène nulle part sous le ciel blanc.. Et le vol d’étourneaux. Si loin et si proche de… c’est beau.

    • Merci Nathalie d’avoir remarqué les étourneaux. Ils sont arrivés comme un seul homme, dans un bruyant froufroutement et se sont discrètement installés dans le texte.

  3. … et me perdre parmi les fantômes, perdre trace, m’y perdre moi-même, la lectrice aussi. Merci Perle.

  4. Une seule image et tant de paysages, tant de lieux, de souvenirs, d’histoires. C’est dense, enivrant. C’est beau.

  5. Science fiction c’est vrai, je n’avais pas vu. Ce serait une autre piste. Merci Piero.

  6. Merci Brigitte. Quelle belle proposition. On fait ça à Tipaza ? L’île madame serait plus pratique mais Tipaza pour le oud, ce serait mieux. Un soir de printemps ?