09 # Histoires à rêver assis.e.s

« Elles commencent une danse circulaire, en battant des mains, en faisant entendre un chant dont il ne sort pas une phrase logique. » Monique WITTIG Les guérillères

A la Croix St ROCH

On dit que les montagnes ne se rencontrent jamais. Lui , raconte qu’on doit apprendre à prier comme une montagne, mais il ne dit pas comment il faut s’y prendre. Dans toutes les religions ou les philosophies prétendûment apaisantes, il y a une conviction de base, comme un laisser – passer que beaucoup acquièrent en abandonnant leurs certitudes pour les troquer contre une allégeance mentale un peu paresseuse. Le mimétisme et l’appartenance à des foules compactes d’adeptes servent de caution à la crédulité. S’ils tournent en rond autour d’un totem, d’un ballon rond ou ovale, d’un ring ou d’une divinité empaillée ou enluminée, pourquoi ne pas les rejoindre. On verra bien ce que ça donne ( au sens d’avantages substantiels ou spirituels).On dit que les montagnes accouchent parfois d’une souris. Lui, préfère en rire.

Elle raconte l’histoire de la Princesse au petit pois, mais lui préfère celle de Poucette. Les contes pour enfants servent à les faire tenir tranquille. Elle invente celle de la Fille qui tombe. Elle tombe de son lit comme on tombe de haut lorsqu’on a trop voulu monter sur ses grands chevaux et que ceux-ci s’étaient emballés dans le paysage. La Tour de Pise n’y est pour rien, La Tour de Babel non plus, c’est une histoire de filles qui se racontent des histoires de filles , celles qu’on n’a jamais racontées jusque là parce qu’elles déplacent désormais les rôles et la hiérarchie des richesses. Ce sont des histoires qui dérangent et laissent un peu de désordre dans les corps et biens. Lui dit qu’il n’a pas peur d’entendre; mais qu’il lui faut un peu de temps pour assimiler le profil des nouveaux personnages. Qu’est-ce qui se passerait si les Fables de la Fontaine étaient écrites par une femme au XXIeme siècle ?

Elle raconte l’histoire des Femmes à travers l’Histoire. Et elle n’a pas d’autre choix que d’envoyer à d’autres femmes, l’image de la dignité et de l’indépendance ce qui ne lui facilite pas la tâche. Le chantier est immense. Les questions sont inépuisables. Les logiques se combattent au risque de la joute stérile. Elle raconte qu’elle n’a plus peur.

A propos de Marie-Thérèse Peyrin

L'entame des jours, est un chantier d'écriture que je mène depuis de nombreuses années. Je n'avais au départ aucune idée préconçue de la forme littéraire que je souhaitais lui donner : poésie ou prose, journal, récit ou roman... Je me suis mise à écrire au fil des mois sur plusieurs supports numériques ou papier. J'ai inclus, dans mes travaux la mise en place du blog de La Cause des Causeuses dès 2007, mais j'ai fréquenté internet et ses premiers forums de discussion en ligne dès fin 2004. J'avais l'intuition que le numérique et l 'écriture sur clavier allaient m'encourager à perfectionner ma pratique et m'ouvrir à des rencontres décisives. Je n'ai pas été déçue, et si je suis plus sélective avec les années, je garde le goût des découvertes inattendues et des promesses qu'elles recèlent encore. J'ai commencé à écrire alors que j'exerçais encore mon activité professionnelle à l'hôpital psy. dans une fonction d'encadrement infirmier, qui me pesait mais me passionnait autant que la lecture et la fréquentation d'oeuvres dont celle de Charles JULIET qui a sans doute déterminé le déclic de ma persévérance. Persévérance sans ambition aucune, mon sentiment étant qu'il ne faut pas "vouloir", le "vouloir pour pouvoir"... Ecrire pour se faire une place au soleil ou sous les projecteurs n'est pas mon propos. J'ai l'humilité d'affirmer que ne pas consacrer tout son temps à l'écriture, et seulement au moment de la retraite, est la marque d'une trajectoire d'écrivain.e ou de poète(sse) passablement tronquée. Je ne regrette rien. Ecrire est un métier, un "artisanat" disent certains, et j'aime observer autour de moi ceux et celles qui s'y consacrent, même à retardement. Ecrire c'est libérer du sentiment et des pensées embusqués, c'est permettre au corps de trouver ses mots et sa voix singulière. On ne le fait pas uniquement pour soi, on laisse venir les autres pour donner la réplique, à la manière des tremblements de "taire"... Soulever l'écorce ne me fait pas peur dans ce contexte. Ecrire ,c'est chercher comment le faire encore mieux... L'entame des jours, c'est le sentiment profond que ce qui est entamé ne peut pas être recommencé, il faut aller au bout du festin avec gourmandise et modération. Savourer le jour présent est un vieil adage, et il n'est pas sans fondement.