#40jours #26 | la traction noire 

Oublier le 5 septembre 2013.
Retour sur le premier trimestre 1960.
Basile a tout juste huit ans.
Comme tous les dimanches, son grand-père paternel, Fulbert, vient le chercher pour aller à la salle Gouloumès. Il attendait avec impatience le coup de sonnette, était déjà prêt, plus que son manteau à enfiler. Il court, il vole.

Il monte dans la traction noire, s’installe sur le siège arrière. Il a toute la banquette pour lui. Il se met bien au milieu pour se voir dans le rétroviseur, salue à peine sa grand-mère – enfin la deuxième épouse de son grand-père, qu’il appelle mémé Charlotte – demande à quel match ils vont assister.

Oui, il sera sage ; oui, il ne courra pas partout, oui, il sera poli, oui oui promis. Vite qu’on y arrive.

plan Salle Gouloumes Mans

Pas facile de se garer, pas beaucoup de place. Pourtant ils arrivent plus d’une heure avant l’heure, vont se garer rue du Repos – le cimetière n’est pas loin, parfois ils y vont avant sur la tombe de sa vraie grand-mère morte bien avant que son propre père ait son âge – , car son grand-père est officiel sur le match. Officiel, il ne sait pas trop ce que cela veut dire. Mais il sait que c’est important. Sans son grand-père, le match n’aurait pas lieu. C’est que qu’il a compris. Ce dimanche-là, il a sauté vite de la voiture, avant que le moteur ne soit arrêté. Il a eu mal. La voiture n’était pas tout à fait garée, grand-père Fulbert manœuvrait encore et roula sur son pied.

Aïe ! mais pas le droit de pleurer. Il n’avait pas à sortir avant l’arrêt complet.
Il ravala ses larmes, boita un peu et oublia dès qu’il eut franchi la double porte de la salle Léopold Gouloumès. Ils étaient déjà là à s’échauffer.

Maintenant en 2022, une maison de retraite remplace la salle Léopold Gouloumès.

A propos de Danielle Masson

L'Ouest de la France quitté depuis plus de 20 ans ... déjà ... pour la Provence Suivre les traces du bon Roi René écrire, faire écrire, partager les mots essayer mais parfois dur, dur !!! joyeuse, enthousiaste à vous lire y apprends tellement

3 commentaires à propos de “#40jours #26 | la traction noire ”

  1. Plein de trous noirs qui aspirent mon imagination… le sport dans la salle ? Le 5 septembre 2013 à oublier ? Et cette traction noire, sans doute traction-avant…

  2. Une petite interrogation sur les sauts temporelles, imparfait, passé simple, présent, pourquoi choisir l’un ou l’autre et en changer ? C’est un peu ma marotte que de poser la question pour amener celles/ceux que je lis à se la poser, c’est assez intéressant. Je pense en effet à l’exercice de l’été dernier, très impressionnant sur Charles Juliet. Ce n’était pas forcément la contrainte du « tu » qui m’avait frappé même si elle était très riche pour penser un personnage et lui donner des contours, mais l’usage du présent de l’indicatif et exclusivement celui-là que j’avais trouvé d’une force remarquable. http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article3657

  3. Rétroliens : #40jours #39 | aller-retour – Tiers Livre | les 40 jours