Bouchon

Eau qui coule et penser d’abord à celle-là, une eau qui bouge, glisse, fuit, qui n’est jamais la même. Le bouchon orange fluo qu’elle emporte entraînant le regard, de la main retenir la ligne un peu par un fil transparent, invisible, finir par le sortir de là pour le rejeter en amont précisément à l’endroit d’où il vient et ce sera pour lui recommencer le même parcours. Court l’eau, obligatoirement.  C’est de cette eau là que je viens. Sinon eau immobile, stagnante, enlisant la pensée, comme pourriture marasme miasmes puanteur fonds invisibles monstres tapis dans la vase, emprisonnant l’élan, le mouvement, comme on épuise le poisson ferré, étouffant le pas sauf à tout lui laisser. Entre les deux, il y a bien l’eau à marées, à vagues comme va-et-vient limité du pendule de l’horloge et de tant de répétitions dans la latitude étroite du mouvement, vague après vague, parfois elle éructe, tempête, déborde, effondre comme on se venge. Appréhender l’eau. Après les yeux, il faudrait y aller depuis la peau depuis la bouche, la laisser mouiller emplir la bouche ou depuis le corps avec le principe d’Archimède et le lui confier comme on se déleste. Lui abandonner le pas gagné et tous ceux d’avant. À l’eau comme on se jette.

A propos de Anne Dejardin

Projet en cours "Le nom qu'on leur a donné..." Résidences secondaires d'une station balnéaire de la Manche. Sur le blog L'impermanence des traces. https://annedejardin.com. Né ici à partir de l'atelier de François, Photographies. Et les prolongations avec un texte pour chaque nom qui dévoile un bout de leur histoire. Avec audios et vidéos, parce que des auteurs ou comédiens ont accepté de lire ces textes, l'énergie que donnent leurs voix. Merci. Sur Youtube : https://www.youtube.com/channel/UC71EVLVR9RIVzTojzdI8yfg

6 commentaires à propos de “Bouchon”

  1. Des eaux filantes aux eaux noires. Et retrouver ta façon (forte et si particulière) de brasser les images

  2. C’est fabuleux toutes ces directions… flèches multiples, fractionnelles, tout à coup rentrées à l’intérieur, « étouffées », rentrant dans les limbes, les fouillant puis revenant ragaillardies – « jetées », ah c’est exactement cette liberté de l’eau, celle de votre phrasé