#enfances #09 | La chambre de derrière

Une porte palière, une autre, condamnée, au bout du mur de droite, aurait pu ouvrir sur la chambre voisine. Deux lits bretons d’une personne, recouverts d’une courtepointe grenat, leurs têtes de part et d’autre d’une cheminée désaffectée, la partie supérieure de son manteau noir en petit granit poli peut servir de table de nuit surélevée, y sont posés un réveil de voyage et une sculpture posture de sainte phosphorescente tenant compagnie, un peu plus haut, à un christ éteint sur sa croix. Un lit cage contre le mur de gauche, une chiffonnière en chêne  de style Louis-Philippe adossée au mur de droite, des incrustations d’ivoire autour des trous de serrure, quatre portes panneaux, deux tiroirs médians garage suspendu abritant une collection de Dinky Toys, un tiroir supérieur disparaissant dans le galbe de l’époque, une horloge moulin en céramique trône au sommet. Au sol, du balatum chiné jaune et brun abimé aux jointures, ciré à la ça-va-seul, trois carpettes dépareillées, le plancher grince sous le bitume, le tic-tac du moulin exagère, il y a débat sur son utilité. Sur le mur du fond, une large fenêtre en quatre parties, dont deux ouvrantes, avec vue sur le jardin, un volet à lames en bois peintes en gris, le dérouleur orientable de la courroie est accroché côté droit du chambranle, en dessous un radiateur à ailettes en fonte, raccordé au chauffage central, dans le coin un lavabo avec deux anses boulonnées pour y déposer les essuies humides, le siphon doit rester rempli pour éviter la remontée d’odeurs d’égout. Entre le lavabo et la fenêtre une petite table au plateau rouge délavé, dessus en complémentaire une machine à coudre Singer vert d’eau, une chaise, une travailleuse boîte à couture sur pied cache un fouillis d’aiguilles, dés, oeufs, ciseaux, fils et bobines. 

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