autobiographies #06 | yeux jaunes, estafette bleue

Deux yeux jaunes, le monstre passe, je devine une masse derrière, au moment où il nous dépasse, nous tremblons, tout tremble, tout grince, je colle mon visage contre le pull qui me protège de la tôle, mes yeux se ferment, un autre monstre arrive, celui-ci n’a qu’une lumière, son cri est plus strident, il va encore plus vite, quand il nous frôle, cela fait un choc contre les parois, deux heures, encore deux heures pour arriver à Nice, et prendre un bateau, ce matin, nous l’avons attendu, il est arrivé fatigué, il nous a souri, on a souri, en étant là il nous fait un merveilleux cadeaux, mais pendant ces heures d’attente, ne sachant pas s’il allait venir, on s’est demandé si on comptait, il a tout effacé avec ce sourire, alors on a chargé l’estafette bleue, celle qu’il a emprunté à un copain et puis on a démarré, en route pour le sud, en route pour une île, là-bas il fait chaud, il parait que c’est un endroit merveilleux, peut-être un des plus beaux de France, je ne sais pas, je ne connais que quelques endroits, bientôt dix heures du matin, samedi matin, dans une ville de banlieue, les passant nous regardent étonné, ils voient deux petite têtes apparaitre dans chacune des vitres arrières, ma sœur et moi, elle est assise au-dessus de la roue de gauche, moi au-dessus de la roue de droite contre la roue de secours, on entre sur l’autoroute du sud, la chaussée est composée de plaques grises rainurées, on est six, deux adultes, deux adolescents, deux enfants, et on emporte deux mobylette deux vélos et les valises pour tout le monde, tout est arrimé par des cordes à l’intérieur des parois de tôle, les premières heures le soleil chauffe, nous jouons, dans un premier temps, c’est à celui qui apercevra le premier un type de véhicule d’une couleur précise, puis nous jouons aux devinettes, l’un de nous pense à un animal, les autres en le questionnant doivent l’identifier, le bruit de roulement et la chaleur épuisent nos jeux, nous regardons sans rien dire la circulation, on s’arrête à une station-service, on sent l’essence, c’est presque écœurant, on va aux toilettes en groupes, filles et garçons, il y a beaucoup de monde, les gens sont un peu perdus, fatigués et pressés, personne n’apprécie d’être ici, ce ne sont que des arrêts par obligation, tout le monde est en partance, on boit un peu d’eau, on goûte quelques biscuits, puis on repart, on somnole un peu, le bruit, la chaleur, la digestion, l’ennui et la nuit arrive, les courbatures aussi, cela fait six heures que l’on est assis sur plaque de tôle, c’est une aventure, tout est inconnu, tout est étonnant, la fraîcheur arrive, on se couvre d’un pull, nouvel arrêt dans une station, toutes les personnes présentent ont des cernes, on a l’impression de participé à un marathon, une course ou chacun devrait s’usé pour avoir le droit de profiter de sa destination, on repart, on s’endort, de temps en temps un monstre nous réveil en sursaut, on replonge, l’estafette s’arrête, on entend les portières, on s’interroge, on est arrivé à Nice, on attend l’accès au bateau pour la corse, il y la mer, on l’aperçoit éclairé par les lumières du port, une immense flaque noire, l’air marin nous réveille, l’épreuve est passé, les vacances vont commencer.

A propos de Laurent Stratos

J'écris. Voir en ligne histoire du tas de sable.

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