#P4 | Fais ce que tu veux…

Fais ce que tu veux, oui, tu as bien entendu, fais ce que tu veux, puisqu’il semble évident que tu feras uniquement ce que tu veux et non ce que je veux moi, c’est entendu, je lâche l’ancre. Vois-tu mon drapeau blanc ? Ok fais ce que tu veux. Reconnais que je suis tolérante, je te laisse libre, tu as les coudées franches, je n’impose rien (même si cela me peine), je suis souple même si ça me désole,  même si ça résiste encore un peu, mais à quoi bon ? Tu perçois peut-être cette légère résistance dans l’inflexion de ma voix, mes lèvres un peu trop serrées, mon regard dur au moment où je dis « fais ce que tu veux ». Je ne t’invite pas gentiment : tu veux quelque chose à boire, à manger ? te promener ? Non, ça c’était avant, avant que tu campes sur tes positions, que tu te cabres et proclames ce que tu veux, non je ne t’invite pas, bien au contraire, je bats en retraite, protégée par mon drapeau blanc, ma réplique : eh bien, fais donc ce que tu veux même si ce que tu veux est bien entendu, absurde, idiot, inapproprié mais ma foi, puisque c’est ce que tu veux, fais-le. Tu vas porter ton désir, ton opiniâtreté comme ton nez au milieu de la figure, ce « ce que tu veux et moi, non », c’est ton idée, ton idée bien à toi, je n’y suis pour rien, et même, je m’en lave les mains, il est entendu que mon avis ne compte pour rien et qu’il ne me reste que ce minuscule espace de silence que je tâche de rendre éloquent au bout de cette phrase « fais ce que tu veux », lâchée dans un soupir excédé, sur un ton mourant au terme d’une lutte épuisante, car jusqu’au bout j’ai tenté de te faire entendre que ce que tu veux n’a aucun sens. Quant aux conséquences, il faudra t’en arranger, il n’y a pas eu moyen, mes forces ont été outrepassées, ton entêtement est véritablement sans borne, tu ne me laisses pas d’autres choix que de céder, il faut bien que l’un de nous deux cède et renonce à ce qu’il veut. Voilà, au fond, ce que tu veux c’est que je renonce à ce que je veux. Je cède et je n’y peux plus rien, je n’ai plus qu’un seul pouvoir, celui de signifier mon impuissance puisque ce que tu veux, Dieu lui-même le veut semble-t-il, advienne que pourra, j’ai perdu la bagarre, je cède, convaincu que bien sûr tu t’en repentiras, c’est inéluctable, je te rappellerai alors que c’est ce que tu as voulu, que je t’avais bien prévenu, mais bon. 

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A propos de Catherine Plée

Je sais pas qui suis-je ? Quelqu'un quelque part, je crois, qui veut écrire depuis bien longtemps, écrit régulièrement depuis dix ans, beaucoup plus sérieusement depuis trois ans avec la découverte de Tierslivre et est bien contente de retrouver la bande des dingues du clavier...

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