#gestes&usages #05 | La chevêchette de Villette

C’est un tout petit oiseau, la chevêchette d’Europe. Pas plus grosse qu’un poing, mais l’air bien décidé. Deux yeux jaunes de chouette, mais pas ces énormes cernes qui font caricature. Elle a des sourcils blancs, tant devant que derrière puisqu’elle a sur la nuque, une fausse face d’elle-même destinée à tromper ses ennemis potentiels.

La pierre doit être lourde, son poids fera sa force, sa beauté et son âme. Il faut qu’elle soit compacte sans fissures ni défauts, mais pas non plus trop lisse pour éviter l’ennui. Il faut pouvoir tourner ses faiblesses en détails.

Sa tête est presque une boule et son corps presque un œuf. Sa queue n’est pas très longue, on ne voit pas ses pattes, bien cachées dans les plumes quand elle est installée à la cime d’un sapin.

La pierre n’est pas très sombre, c’est du marbre de Villette, le crayon noir suffira pour tracer les grandes lignes. Ensuite bien soigneusement, affuter les ciseaux. Vérifier le compresseur, le masque pour le nez, le casque pour les oreilles et bien sur les lunettes pour protéger les yeux.

Posée sur la pierre froide, une main poussiéreuse dont les doigts, distraitement, fourragent dans la chaleur des plumes de l’oiseau

Visite, hier, à un ami sculpteur. Merci, Jean, pour le temps et les mains

A propos de Juliette Derimay

Juliette Derimay, lit avidement et écrit timidement, tout au bout d’un petit chemin dans la montagne en Savoie. Travaille dans un labo photo de tirages d’art. Construit doucement des liens entre les images des autres et ses propres textes. Entre autres. À retrouver sur son site les enlivreurs.

7 commentaires à propos de “#gestes&usages #05 | La chevêchette de Villette”

    • Discussion avec cet ami sculpteur qui me disait préférer la pierre au bois à cause de son poids… Et les gros-becs casse-noyaux juste devant la fenêtre.
      Oui, tenir une chouette qui s’était coincée dans la cheminée pour la relâcher, la mémoire gardera toujours ça

  1. « une fausse face d’elle-même destinée à tromper ses ennemis potentiels. » cette histoire de leurre me plait. Et le nom : La chevêchette de Villette . Et la lourdeur de la pierre qui recevra l’âme. L’âme dans la pierre . Merci

  2. mains contre corps d’oiseau, mains enveloppant les plumes de l’oiseau, on a tous connu ça
    c’est beau…
    entre geste de sculpteur et envol de la petite chouette chevêchette, ton regard qui fourrage lui aussi

Laisser un commentaire