L # 11 il ne reste plus qu’à chanter

Faire mienne la phrase de Samuel Beckett : « Quand on est dans la merde jusqu’au cou, il ne reste plus qu’à chanter »

je ferai mienne cette phrase, je chanterai non pas comme chanter ça va me changer les idées, mais comme faut y croire à la vie, faut la regarder en face, avec ses lumières, ses ombres, en s’émerveillant de ses possibles, de ses changements à venir, chanter donc comme le merle au petit matin, comme l’enfant qui gazouille dans son berceau, le moine qui psalmodie une litanie, comme si j’habitais le chant du monde, comme si l’avenir s’ouvrait grand devant moi, non pas en allant vers la catastrophe annoncée et l’effondrement de nos sociétés, mais vers un temps autre, différent, à inventer, donc je chanterai non pas comme dans les camps scouts d’autrefois, quand ensommeillés encore, on bramait au petit matin le ciel est bleu, réveille-toi, c’est un jour qui commence, poussant la chansonnette comme une rengaine vide de sens, comme si ce jour nouveau devait être différent du précédent, non, il serait le même, facile et insipide, on s’en doutait… mais comme si j’entrais dans le rêve éveillé de l’utopie, comme si m’arrachant du chaos, donc prête à sortir de cette merde qui m’enfermait jusqu’au cou, comme si elle voulait m’ étouffer, entrer dans ma bouche, comme si elle voulait m’interdire de parole, comme si en dépit des obstacles, enfin je décidais de vivre l’incertitude comme la certitude du moment, non pas dans l’illusion qui sécurise, mais de dire sans hésitation donc je ne sais pas et d’y trouver une forme d’espoir, alors sûrement ma voix s’élèvera claire et juste, alors elle s’unira à celle de mes pairs pour faire barrage aux violences du monde et nous serons

Tous en ce monde Sur la crête d’un enfer À contempler les fleurs

nous inventerons un nouvel horizon.

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