#L6 Les seuls

Voix 1

Dans la nuit, c’est lui qui me sauve. Le dos à lui tiède. Il retient le froid de m’envahir dans la nuit. Du sable froid par les pieds, par les pieds du béton de sable, dans la nuit, c’est du béton. De la poussée de froid sous les étoiles. Il n’y a plus d’insectes volants moites de la journée. Aride. Le souffle dès le matin. La chaleur je la sens avant d’ouvrir les yeux. Le soleil est déjà sur les avants-bras suants. Le foulard autour du cou est à essorer dès 10h. Tous les jours et les suivants encore tant qu’on planquera ici. Dans ce trou perdu désertique. Ce rocher me sauve. Je n’ai pas la haine. Si je suis là, je ne peux pas avoir la haine.

Voix 2

la dernière fois que j’ai ouvert les yeux, je l’ai vu sur une planche de bois sur l’eau troublante en train de mâcher je ne sais quoi me regardant, un coude appuyé sur une grande perche. Il n’y avait donc pas de fond mais cela rendait cette image magique et je ne voulais pas savoir si je rêvais ou non. Rêver ou ouvrir les yeux, ça tient qu’à un fil des fois on se dit que ça vaut pas l’coup. Tout entier dans le rêve moi je ne sais pas si je suis le même les yeux ouverts. Ça me ressemble pas.

Voix 3

Ils sont différents. Les toucher. Je les ramasse et je les caresse des petits poils. Quand on les regarde, on croit qu’ils sont lisses. À la lumière, des fois, ils sont un peu argentés. Mais on ne voit par leurs poils. Il y a des choses qu’on voit et des choses qu’on sent. Même si je me concentre avec mes yeux, je ne vois pas je les choisis. Bien bombés. Celui-là. Comme des petits serpents qui auraient mangé des boules de houx. Là on verrait les petites bosses. Mais les serpents je les toucherais pas poils froids hérissés à chaque fois que j’y pense je veux pas dire les mots comme ça j’y pense pas. Je ne vais pas en manger maintenant. Il n’y en aura pas assez si j’en mange. Elle me dira rien mais mais elle dira qu’il n’yen a pas beaucoup à cuire. Je préfère cru. Du jus, peu qui sort. Un petit ventre en boule plein de jus qui court quand il était dans mon ventre. Je touchais mon ventre aussi ma petite boule qui poussait en avant de moi. Recroquevillée sur lui-même en avant. Il y en aura assez. La toile d’araignée aux carreaux. Un peu de perles de poussières. Elle ne se montre pas. Que la toile. On ne l’enlève pas ça ne se retire pas une toile d’araignée. Le rouge gorge. Le même. Dans la prison d’aubépine ses petits cris sont pour qui la plante des pieds de chaud. Trop brûlant les ardoises. Je vais pas les faire tomber tant pis je cours le feu sous les pieds cette lumière blanche dans les yeux

A propos de Marion Dulon

Entre mots et images et éducation spécialisée, tentative de passerelles. Toujours encore écrire et questionner le faire écrire.