#P6 (1) ce qui reste au dessus du tamis

Mardi 20 – C’est déjà trop loin ? Rien n’apparaît qui se distinguerait de la chaleur, de la torpeur et l’impression enveloppante d’être privée de mon rythme et le dos qui le rappelle.

Mercredi 21 – Le son de quelques gammes, petits fragments de morceaux qui s’imposent, juste le temps de faire résonner la caisse contre moi, de sentir les cordes sous les doigts, même pas accordée, la discipline fait défaut en ce mois de juillet et promesse d’y revenir bientôt.

Jeudi 22 – Partage avec une petite fée de la découverte improbable de pommes de terre malgré le mildiou, un cadeau du potager, et encore là et là, sous la fourche, au moins 4 kilos, finalement plus que le rien attendu, roses, peau fine qui se détache sans effort, ridicule fierté de lui avoir offert ce moment.

Vendredi 23 – Préparation d’une valise, la liste est prête mais l’improvisation prend le dessus, le doute, casse-tête pour le choix, tout prévoir, quel temps fera-t-il, des chaussures ou d’autres, et un pull et la lampe pour lire le soir et les cahiers, la préparation d’une valise ce n’est pas ce qu’on y met mais ce que l’on n’y mettra pas.

Samedi 24 – Halte dans ce restaurant, la serveuse est si maigre, de loin une allure jeune démentie plus près par un visage fatigué recouvert d’un fond de teint épais, une voix pleine de toutes les cigarettes fumées, elle s’agite efficacement d’une table à l’autre, en ce jour de juillet elle porte des collants noirs, un peu filés par endroit et me laisse triste pour elle.

Dimanche 25 – Une délicieuse tarte aux tomates avec moutarde et chèvre, acidité de la tomate qui irrite les lèvres, douceur du chèvre et la pâte qui croustille, et petites surprises piquantes lorsque le palais rencontre la moutarde par endroits.

Lundi 26 –La carte n’indique pas ce chemin, le moulin sur la gauche, les mégalithes sur la droite, l’étang, mais pourtant on doit se trouver là puisque qu’on voit le signe du GR, on devrait le croiser alors pourquoi sommes-nous dessus ? C’est presque effrayant de ne pas savoir lire cette carte,  une carte récente, la carte n’est pas le territoire ça c’est bien sûr, ce chemin est récent c’est certain, le gravillon est neuf, la lande si accueillante devient inquiétante quand on ne sait pas où on est sur la carte et on est pourtant bien là sur le sol.

A propos de Isabelle Charreau

j’arpente plus facilement les chemins de terre que les pavés de la ville, je fréquente l’atelier pour le plaisir comme des gammes, sans projet de partition

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