P #2 .«Si je ne parle pas…»

Parler à voix haute plus fort doucement à juste titre à tort et à raison parler intimement parler à quelqu’un se parler à soi parler de tout et de n’importe quoi sérieusement facilement du haut de son estrade à qui mieux mieux sans vergogne parler tout seul parler pour ne rien dire, mais dire c’est plus que parler on parle sentencieusement on dit brutalement on dit méchamment mais c’est dit, ne pas parler en hurlant mais parle à la fin toutes les choses non dites en boomerang elles reviennent pourquoi tu n’as pas parlé elle aurait, dû parler pourquoi elle ne parle pas ? n’a pas les mots ne veut pas et la vie va, invisible inaudible on s’efface on ne compte plus chut des babillements bégayer murmurer à l’oreille un secret les enfants murmurent des secrets la main en coquille pour que personne d’autre n’entende un murmure le son très bas de lui qui parle tout seul il dialogue avec lui-même, déclamer un vieux mot on ne déclame plus on profère on annonce on oblige on tord les mots une parole tordue dévoie les mots volontairement on parle faux une parole vraie une parole qui dit ce quelle fait et fait ce qu’elle dit, se parler s’expliquer il faudrait un traducteur souvent pour décrypter, autrement c’est l’embrouille, un traducteur dans un colloque parle des mots choisis rapidement dans une langue autre la merveille de ses paroles en alternance instantanément le parler de l’autre dans sa langue nous parle dans la nôtre ils ne dialoguent pas ils s’écoutent Tandis que d’autres coupent la parole ce dont abusent beaucoup, tu causes tu causes et qu’est-ce que tu dis ? il veut parler aussi radoter parfois tout seul dans sa barbe un soliloque inaudible, les paraboles ces récits allégoriques usent de comparaisons tenir parole non il n’en a pas il dit mais passe outre une parole en l’air, de belles paroles rabâchées et répétées à longueur d’année à des oreilles sensibles ou malléables en fait une parole usurpée chacun fabrique la sienne on la passe ou on la prend on se dédit on se rétracte, la force de la parole apaisante chaleureuse amicale tranchante cassante malheureuse mesurée ou abondante bavarde les paroles de chansons on les chante on slame on rappe du rythme de la poésie, les paroles parfois postillons éructés contre les pauvres les chomeurs les émigrés jusqu’à la nausée elle peut endormir et elle peut réveiller c’est une parole d’or Pacôme Thiellement le sait «Tu m’as donné de la crasse et j’en ai fait de l’or.

4 commentaires à propos de “P #2 .«Si je ne parle pas…»”

    • Oui, mais j’allais insister plus sur les postillons éructés contre les pauvres les chômeurs les émigrés, et surtout par qui. et plus encore…Bon, on n’est pas dans un meeting non plus.

  1. La parole multipliée … si riche … si différente … ça m’a fait penser à la proposition P4 et à Nathalie Sarraute. Etonnant de sentir les liens entre nos textes au fur et à mesure de l’atelier.