#40jours #39 | tard dans la vie

La lumière filtrant sous la porte de Walter Benjamin m’a permis de jeter toutes les âneries que j’avais écrites à mesure que je le lisais. Tout était réel pourtant, mais ce qu’il reste, au bout d’une journée à chercher comment j’allais mettre tout ça en forme, ce sont deux moments de lumière encore là, si tard dans ma vie.

Notre père si inquiet tracassé mal dans sa peau restait tard le soir à la table pour travailler aux « contributions » jusqu’à minuit, une heure, à aligner des chiffres, pour les déclarations d’impôts et les vérifications des particuliers, pas d’informatique  encore. Seulement tous les soirs, il écoutait de la musique classique, Beethoven surtout, Tchaikovsky, Vivaldi, Rimsky-Korsakov Sibelius. De mon lit, j’écoutais, au début, un amas de notes plus ou moins audibles, et puis, soir après soir, un air de hautbois, des violons, cette mélodie que j’attendais, un bonheur insensé.

Et puis, dans une enfance banale et triste où rien n’arrivait rien ne se passait, on allait à l’école des sœurs, et j’ai accroché, bien trop accroché, il a fallu du temps pour que j’en convienne, ce petit carnet bleu qui m’apportait énormément, comblait mon désir d’absolu, trainait avec lui une culpabilité énorme, et ce besoin de racheter, tout le temps. Sans doute une enfance trop fermée mais moi pas très fine.

Aujourd’hui encore quand je me retourne l’essentiel est là que je n’ai pas fini de comprendre : jouer du piano parce que je sens mieux que je ne sais dire, et toujours essayer d’aimer parce que dans les situations les plus dures revient toujours ce sursaut ce ressort de force de vie sans plus d’intermédiaire.

4 commentaires à propos de “#40jours #39 | tard dans la vie”

  1. cette lumière qui passe sous la porte, le carnet bleu, le piano merci pour ces touches effleurées, ces notes si pleine de vie

  2. Je te remercie, Nathalie. Cette fin d’atelier est très dure et pas le temps de lire les autres, pas le temps de…et de …Merci pour tes mots, merci pour ce que tu dis dans tes textes. pour tes fenêtres voilées.

  3. j’aime vraiment beaucoup ce texte, cette fatigue relatée de ce qui encombre, de ce temps non conçu pour la vive allure (tempo destructeur d’absence), pour votre présence entière comme une noix entière dans la paume si bonne au goût, pour votre écriture qui prend toute la bouche, pour cette foi tout à coup en l’autre, pour la mélodie que j’entends de vous, peut-être un Schubert