#comme | Je t’attends comme

Je t’attends comme le réverbère éteint — ampoule cassée il y a longtemps par l’enfant maladroit—

Je t’attends comme tu arrives en voiture et je te dispute

Je t’attends comme je te veille dans le noir comme dans la lumière du jour

Je t’attends comme l’arrêt de bus, je lève la main je veux monter te laisser l’arrêt vide

Je t’attends comme le bus se remplit de passagers qui montent descendent, arrivent partent, poinçonnent fraudent

Je t’attends comme mal garée, pas d’argent pour l’horodateur

Je t’attends comme feu rouge attend vert

Je t’attends comme je roule vite de peur d’avoir trop attendu en regardant les gens traverser

Je t’attends comme je t’appelle lorsque ta silhouette apparaît sous le réverbère

Je t’attends comme le trottoir très étroit encombré de poubelles

Je t’attends comme le banc sur lequel est assis le petit vieux les yeux dans le vide, la canne appuyée contre le genou, la casquette grise sur la tête par tout temps ;

Je t’attends comme j’ai le temps sur le banc pour te faire des promesses de banc

Je t’attends comme une fesse sur le banc et l’autre dans le vide

Je t’attends comme le caniveau mouillé par la pluie, je cumule, me remplis

Je t’attends comme les plaques d’égouts bien fermées sur leur secret

Je t’attends comme les gravillons déversés par le camion  englués dans le goudron, écrasés par le rouleau compresseur.

A propos de Françoise Anouk Sullivan

Avant: USA-France. Prof littérature — Maintenant: il doit bien y avoir un lien entre ma passion pour l'aviron, sa pratique et mon désir d'écriture.— Après ...