autobiographies #03 | l’être

As-tu aperçu arbre de ma fenêtre l’enfant que j’étais ? Tout en haut de la maison, là où ta cime pouvait être contemplé. M’as-tu parlé un jour ? As-tu seulement été attentif à mon existence ?

Toi, sans affects, ni pensées. 

Rappelle- toi, dans les jours de grands vents, j’ai frémi que tu tombes, mais solide, tu restais.

Adolescente, sur tes racines, de mes pas incertains, je trébuchais. Larmes contre ton tronc, ma peine, je hurlais, mais digne et stoïque, tu étais.

Toi, sans affects, ni pensées.

Ressens-tu les vibrations du monde ? Puises-tu de tes racines profondes, l’invisible à nos yeux ?

Pourquoi te protéger le tronc d’écorce, trajectoire souterraine pour ton cœur ?

On aimerait te savoir nous entendre.

Toi, sans affects, ni pensées.

Je pense donc je suis, mais toi qui ne penses pas, n’es-tu pas ?

Vivant, respirant, circulant, innervé,

mon être contre ton être,

tout simplement, être.

A propos de Clarence Massiani

J'entre au théâtre dès l'adolescence afin de me donner la parole et dire celle des autres. Je m'aventure au cinéma et à la télévision puis explore l'art de la narration et du collectage de la parole- Depuis 25 ans, je donne corps et voix à tous ces mots à travers des performances, spectacles et écritures littéraires. Publie dans la revue Nectart N°11 en juin 2020 : "l'art de collecter la parole et de rendre visible les invisibles" voir : Cairn, Nectart et son site clarencemassiani.com.

17 commentaires à propos de “autobiographies #03 | l’être”

    • J’ai bien entendu cette histoire de mot « être » que tu as évoqué dans le train – Je vais lire le livre  » Comment je suis devenue arbre », j’ai trés envie.

      Merci.

  1. … du mal à communiquer quand on ne parle pas le même langage – impression que l’on se cogne la tête contre du bois dur… Merci d’avoir exploré de ce côté-là.

  2. Face à face, aller retour, miroir, qui est qui, sans affect sans pensées, vibrant, étrange va et vient de l’un à l’autre. Merci, Clarence. Après toutes tes interrogations au zoom… Et voilà !

    • Bonjour anne

      Oui beaucoup d’interrogations et qui durent, difficile le monde non humain, végétal, animal, à qui l’on prête des pensées et de l’affect.

      S’ils pouvaient parler que diraient ils ces mondes et ils parlent certainement mais que comprenons nous ?

      Bref, vaste sujet….
      Merci pour ta lecture et à bientôt.
      Bonne journée à toi

  3. Très beau ce texte comme un poème. Pourquoi la forme du poème ? C’est étonnant le poème me vient souvent en premier comme un laboratoire mais pas sur cette proposition. Et quand je te lis je me dis que j’aurais peut-être dû travailler de ce côté là. Bref merci pour tes mots en tout cas !

  4. Oui, tout ce qu’on prête à qui ne parle pas… mais tant d’émanations pourtant, tant de perceptions de toutes espèces
    Et il a dû voir la petite que tu étais, bien sûr que oui… il t’a vue…

    • Merci Françoise –

      Une véritable interrogation cette proposition –

      Et oui, tant d’émanations, comme tu le dis… Mais j’ai aimé chercher comment aller vers ce travail, cette relation à l’arbre.

      A bientôt.